Pour répondre à ces enjeux, la SCET et Carbone 4 ont mené une étude pour le compte de l’Ademe, visant à évaluer l’empreinte environnementale du tourisme et à proposer des pistes d’action pour un développement plus durable.
Mesurer l’impact climatique du tourisme
Un Bilan des émissions de gaz à effet de serre (BEGES) spécifique au secteur touristique a été réalisé pour l’année 2022. Cette analyse, qui fait suite à une première évaluation en 2018, permet d’identifier les principales sources d’émissions et de cartographier les flux de voyageurs. Le BEGES couvre l’ensemble de la chaîne de valeur du tourisme, incluant l’hébergement, les transports, la restauration, les activités culturelles et sportives, ainsi que la construction et l’exploitation des infrastructures touristiques.
En 2022, le tourisme en France a émis 97 millions de tonnes de CO2e (équivalent CO2), dont 69 % sont liées aux transports. L’aviation représente à elle seule 29 % de ces émissions, soulignant l’importance de réduire l’impact des déplacements longue distance. À titre de comparaison, cette empreinte carbone équivaut à celle de 10 millions de Français sur une année, ce qui illustre la nécessité de décarboner ce secteur pour atteindre les objectifs climatiques.
Une baisse des émissions à consolider
Entre 2018 et 2022, les émissions du secteur touristique ont diminué de 16 %. Cette réduction est en grande partie attribuable à la crise sanitaire, qui a limité les déplacements et favorisé un tourisme plus local. Les distances parcourues par les voyageurs ont ainsi été réduites de 30 %, tout en maintenant un niveau de consommation touristique stable, autour de 180 milliards d’euros.
Cependant, cette baisse reste largement conjoncturelle. Avec la reprise du trafic aérien en 2023, qui a retrouvé son niveau d’avant pandémie, il est crucial de mettre en place des mesures structurelles pour pérenniser cette tendance. L’enjeu est de réduire les émissions de 35 à 50 % d’ici à 2030, conformément aux objectifs de l’Accord de Paris.
Vers un tourisme européen plus durable
Les touristes non-européens, bien qu’ils ne représentent que 5 % des nuitées, génèrent 20 % des émissions de gaz à effet de serre du secteur. En moyenne, un visiteur non-européen émet six fois plus de CO2e par nuitée qu’un touriste français et trois fois plus qu’un touriste européen. Cette différence s’explique principalement par l’utilisation de l’avion pour les longs trajets.
Pour réduire cet impact, il est essentiel de privilégier un tourisme de proximité, en ciblant les clientèles françaises et européennes. Cela permettrait de limiter les émissions tout en soutenant l’économie locale.
Transition énergétique et efficacité
La consommation énergétique des hébergements et des restaurants a diminué de 12 % entre 2018 et 2022. Cette réduction est due à plusieurs facteurs : la baisse du nombre de nuitées pendant la crise sanitaire, la hausse des coûts de l’énergie incitant à des économies, et une amélioration de l’efficacité énergétique des infrastructures. Par ailleurs, la sortie progressive du fioul dans le mix énergétique du secteur a également contribué à cette évolution.
Pistes d’action pour un tourisme durable
Pour atteindre les objectifs climatiques, trois leviers d’action sont prioritaires :
- Favoriser un tourisme local : encourager les séjours de proximité et développer des offres bas-carbone, comme l’itinérance à vélo ou les éco-séjours.
- Améliorer l’efficacité énergétique : réduire la consommation d’énergie dans les hébergements, les transports et les activités touristiques.
- Recourir aux énergies bas-carbone : accélérer la transition vers des sources d’énergie renouvelables pour l’ensemble du secteur.
La mobilisation de tous les acteurs est essentielle : visiteurs, professionnels du tourisme, pouvoirs publics et institutions. Des initiatives comme la mise en place d’une gouvernance dédiée, la promotion de la mobilité décarbonée et l’accompagnement des territoires via des guides et des formations sont des étapes clés pour réussir cette transition.
Si la baisse des émissions observée entre 2018 et 2022 est encourageante, elle reste insuffisante pour répondre aux enjeux climatiques. La transformation du modèle touristique français nécessite une action concertée et ambitieuse, combinant innovation, sensibilisation et engagement de tous les acteurs. En adoptant des pratiques plus durables, le tourisme peut continuer à jouer un rôle économique majeur tout en réduisant son empreinte environnementale.