Ce procès s’est ouvert en juin dernier lors de la désignation officielle du juge en charge de l’affaire puis s’est poursuivi pendant un mois à travers une série d’audiences techniques. Mais ce n’est que depuis lundi que les débats de fond ont commencé. Ces derniers devraient au moins durer trois semaines.
Au centre des débats : le Round Up. Ce désherbant, commercialisé depuis plus de 40 ans, est sans conteste l’herbicide le plus vendu au monde. Depuis quelques années, de vifs débats tournent autour du glyphosate : malgré de nombreuses études scientifiques, des doutes subsistent quant au caractère cancérigène de cette substance chimique controversée.
On ne compte plus les procédures judiciaires lancées contre Monsanto aux États-Unis. Mais la plainte de Dewayne Johnson, un utilisateur de Round Up américain de 46 ans atteint d’un cancer, est la première à aboutir : pour la première fois, un tribunal va devoir se prononcer sur les effets cancérigènes potentiels du Round Up et l’implication du géant de l’agrochimie dans ce qui pourrait être le plus gros scandale sanitaire du siècle.
Monsanto, dont la ligne de défense est de réfuter l’existence de lien de cause à effet entre l’utilisation du Round Up et le développement du cancer, risque des millions de dommages et intérêts dans ce dossier.
Pour l’avocat de M. Johnson, le lymphome non-hodgkinien incurable de son client n’est pas à mettre sur le compte de la malchance ni d’un problème génétique : « c’est à cause de son exposition continue au Round Up » qu’il a vaporisé sur les terrains scolaires de la ville de Benicia (en Californie) entre 2012 et 2014.
L’objectif du projet est également de prouver que Monsanto a sciemment caché au public les dangers de son produit phare. Mais pour remporter la partie, et obtenir un jugement à « plusieurs millions de dollars », les avocats du plaignant vont devoir établir le lien entre le cancer de M. Johnson et l’épandage de glyphosate.
Du côté de l’accusé, on réfute bien évidemment l’existence d’un tel lien. À la question « est-ce que l’exposition de M. Johnson au glyphosate a provoqué son cancer ? », les avocats de Monsanto répondent inlassablement « non ». Ces derniers promettent « beaucoup de données et de science » et comptenr lever les doutes sur la culpabilité de la multinationale avec « des études qui ont suivi pendant des années et des années des gens qui ont utilisé ces produits » mais qui n’ont pas démontré des risques de cancer.
« Légalement, il est extrêmement difficile de rendre une entreprise responsable de cas spécifiques de cancer ou autres maladies liées aux pesticides (…). Mais si M. Johnson gagne ce procès, ce sera un énorme coup porté à l’industrie des pesticides toute entière », estime Linda Wells de l’ONG « Pesticide Action Network North America ».