Réduction des pesticides : pourquoi les objectifs européens peinent à être atteints

Réduction des pesticides : pourquoi les objectifs européens peinent à être atteints
Une ambition affichée, des résultats décevants Depuis le lancement du Pacte vert pour l’Europe et de la stratégie « De la ferme à la table », l’Union européenne s’est engagée à réduire de 50 % l’usage et les risques liés aux pesticides d’ici 2030. Cette mesure vise à protéger la biodiversité, la santé humaine et les sols, tout en accélérant la transition vers une agriculture plus durable.

Pourtant, malgré ces engagements, les chiffres stagnent, voire progressent dans certains États membres. En 2023, la Commission européenne a reconnu que les réductions étaient loin d’être uniformes et que certains pays avaient même augmenté leur recours aux substances les plus toxiques. Le projet de règlement sur l’utilisation durable des pesticides (SUR) a finalement été retiré début 2024 sous la pression politique et sociale.

Une résistance politique et agricole persistante

Plusieurs facteurs expliquent ces difficultés. D’abord, la dépendance structurelle de nombreux modèles agricoles aux intrants chimiques reste forte. Les alternatives, comme les biocontrôles ou l’agriculture de précision, ne sont pas toujours disponibles à grande échelle ni économiquement accessibles à toutes les exploitations.

Ensuite, la fronde de certains syndicats agricoles et de gouvernements nationaux a contribué à freiner les ambitions européennes. La crainte d’une baisse de rendement, d’un surcoût pour les agriculteurs et d’une perte de compétitivité face aux importations non soumises aux mêmes règles alimente le débat.

Des impacts concrets sur la santé et l’environnement

L’usage intensif de pesticides est pourtant reconnu comme un facteur majeur de déclin de la biodiversité, notamment des pollinisateurs, mais aussi des oiseaux et des organismes aquatiques. Il contribue également à la pollution des nappes phréatiques et des rivières.

Du côté de la santé humaine, de nombreuses études établissent un lien entre exposition aux pesticides et certaines pathologies chroniques, comme les cancers, les troubles neurologiques ou les problèmes de fertilité, en particulier chez les agriculteurs et les populations vivant à proximité des zones agricoles.

Vers une relance des objectifs sous une autre forme ?

Face aux contestations, la Commission européenne envisage désormais une approche plus souple et différenciée, qui laisserait davantage de marges de manœuvre aux États membres tout en conservant un objectif commun de réduction.

Les ONG et scientifiques appellent, quant à eux, à ne pas abandonner cette bataille. Ils plaident pour un accompagnement renforcé des agriculteurs, une fiscalité incitative, le développement de la recherche sur les alternatives et une meilleure transparence sur l’usage réel des pesticides.

La réduction des pesticides reste un enjeu central pour rendre l’agriculture européenne plus résiliente, plus saine et plus compatible avec les limites planétaires. Encore faut-il lui donner les moyens politiques, économiques et techniques d’aboutir.