Une dynamique portée par la réglementation
Le succès des bus à zéro émission est avant tout le résultat d’une politique européenne qui impose progressivement l’abandon des motorisations polluantes. « La réglementation européenne a clairement indiqué au marché que les jours du diesel étaient comptés », explique Marie Chéron, experte pour T&E France. D’ici 2035, tous les bus de ville devront être à zéro émission, une échéance qui incite de nombreuses municipalités à anticiper le changement.
Outre ces contraintes réglementaires, plusieurs mesures locales, comme la création de zones à faibles émissions, favorisent l’essor des bus électriques et à hydrogène. Certains pays affichent déjà une avance significative : aux Pays-Bas, en Islande et en Finlande, 100 % des bus urbains neufs vendus en 2024 sont électriques. La Norvège et le Luxembourg suivent de près, avec respectivement 99 % et 98 % de bus électriques immatriculés.
La France à la traîne
Alors que plusieurs pays européens opèrent une transition rapide, la France accuse un retard notable. Seulement 33 % des bus urbains immatriculés en 2024 sont électriques, un chiffre inférieur à la moyenne européenne (46 %). L’un des facteurs expliquant cette situation est le choix de nombreuses collectivités françaises, comme en Île-de-France, d’investir dans des bus fonctionnant au gaz et au biogaz. Avec 39 % de bus urbains neufs roulant au gaz en 2024, la France se distingue comme l’un des rares pays à privilégier cette énergie intermédiaire.
Un pari qui pourrait s’avérer risqué, prévient T&E. « La part importante de gaz (biogaz compris) dans les immatriculations devrait faire l’objet d’une vigilance particulière en France. Elle peut devenir un piège pour les collectivités car elle retarde leur transition vers les technologies zéro émission », alerte Marie Chéron. Une stratégie qui, à terme, pourrait entraîner des coûts supplémentaires pour les municipalités contraintes de réadapter leur flotte de bus.
Des disparités marquées en Europe
D’autres pays affichent des performances contrastées. L’Estonie se distingue par une transition spectaculaire : alors qu’aucun bus électrique n’était immatriculé en 2023, ils représentent 84 % des nouveaux bus en 2024. À l’inverse, l’Allemagne peine également à accélérer sa transition avec seulement 25 % de bus électriques. L’Espagne (57 %) et le Royaume-Uni (56 %) avancent plus rapidement. En queue de classement, la Grèce (9 %), la Lituanie (5 %), la Hongrie (4 %) et la Slovaquie (0 %) restent encore largement dominées par les motorisations thermiques.
Avec une adoption plus rapide que prévu des bus à zéro émission, l’Europe semble en bonne voie pour atteindre ses objectifs climatiques. Reste à voir si les pays en retard, à l’image de la France, sauront ajuster leur stratégie pour suivre la cadence.