IA, data centers et énergie : quels enjeux pour demain ?

IA, data centers et énergie : quels enjeux pour demain ?
Le secteur des technologies de l’information et de la communication (TIC) consomme aujourd’hui près de 9 % de l’électricité mondiale. Dans ce paysage, les data centers représentent entre 1 et 1,3 % de cette consommation, tandis que l’intelligence artificielle (IA) en absorbe moins de 0,2 %. Cependant, la demande énergétique liée à l’IA, qui pèse déjà 10 % sur les data centers, est en forte hausse. Les prévisions indiquent que d’ici 2030, l’IA pourrait représenter jusqu’à 20 % de la consommation électrique de ces infrastructures. Cette tendance s’explique par l’expansion du cloud computing et, plus récemment, par le développement accéléré des applications d’IA.

À l’échelle mondiale, la consommation d’électricité des data centers devrait atteindre entre 1 000 et 2 000 térawattheures (TWh) d’ici 2030. Bien que cette augmentation soit notable, elle reste modeste comparée à d’autres secteurs comme la climatisation ou l’électrification des industries. Toutefois, la concentration géographique des data centers dans certaines régions pose des défis spécifiques.

Aux États-Unis, où se trouve plus de la moitié des data centers mondiaux, leur part dans la consommation électrique totale pourrait passer de 4 % en 2024 à 13 % en 2030, atteignant ainsi 560 TWh. En Europe, la demande liée à l’IA devrait représenter 4 à 5 % de la consommation électrique totale d’ici là, contre 2 à 3 % actuellement.

Les défis énergétiques et technologiques

L’explosion de la demande énergétique des data centers et de l’IA soulève plusieurs enjeux majeurs. Premièrement, les réseaux électriques, déjà sous tension, doivent faire face à des délais d’attente croissants pour connecter de nouvelles infrastructures. Aux États-Unis et en Europe, cette pression nécessite des investissements massifs dans des capacités de production pilotables, notamment en gaz naturel, pour répondre à la demande. Par ailleurs, la concentration du marché des puces électroniques, dans un contexte de tensions géopolitiques et commerciales, pourrait ralentir le déploiement de l’IA.

D’autres défis incluent la gestion des ressources en eau, essentielles pour le refroidissement des data centers, ainsi que la formation des travailleurs pour accompagner cette transition technologique. Enfin, la flexibilité des data centers, c’est-à-dire leur capacité à adapter leur consommation en fonction des disponibilités du réseau, sera un facteur clé pour limiter leur impact sur les systèmes énergétiques.

Les acteurs clés et leurs stratégies

Les géants technologiques, souvent désignés sous l’acronyme GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft), jouent un rôle central dans le déploiement des data centers. Cependant, leur engagement en faveur de la neutralité carbone est mis à rude épreuve par la croissance rapide de la demande électrique et des infrastructures nécessaires à l’IA. Pour atténuer leur empreinte environnementale, ces entreprises investissent massivement dans les énergies renouvelables, notamment via des contrats d’achat d’électricité (PPA), ainsi que dans l’énergie nucléaire et les petits réacteurs modulaires (SMR). Par ailleurs, leur flotte croissante de véhicules électriques à chargement bidirectionnel pourrait contribuer à équilibrer le réseau électrique.

De leur côté, les majors pétrolières et gazières voient dans l’IA une opportunité de décarboner leurs activités plus rapidement. Elles explorent également des investissements accrus dans les énergies renouvelables pour répondre à la demande croissante des data centers.

Concentration géographique et projets d’envergure

À l’avenir, les data centers devraient se concentrer davantage dans des régions offrant une énergie abondante et compétitive. Aux États-Unis, cette tendance se confirme avec des projets pharaoniques comme Stargate, doté d’un budget de 500 milliards de dollars.

En Europe, les pays scandinaves et la France, grâce à leur mix énergétique bas carbone, ainsi que l’Allemagne, le Royaume-Uni et l’Irlande, attractifs pour leurs industries et leurs avantages fiscaux, accueilleront une part importante des nouvelles infrastructures. La France, par exemple, a annoncé un investissement de 109 milliards d’euros pour développer des data centers d’une capacité pouvant atteindre 5 gigawatts (GW), ce qui pourrait favoriser le recours à l’énergie nucléaire.

Vers une IA durable ?

Lors du sommet pour l’action sur l’IA, tenu à Paris en février 2025, les participants ont souligné la nécessité de concevoir une intelligence artificielle compatible avec les objectifs de transition énergétique. Les avancées technologiques, comme l’optimisation des algorithmes et l’amélioration de l’efficacité énergétique des data centers, seront essentielles pour concilier innovation et durabilité.

Si l’IA et les data centers représentent un défi énergétique croissant, ils offrent également des opportunités pour accélérer la transition vers des systèmes plus efficaces et moins carbonés. La collaboration entre les acteurs technologiques, énergétiques et politiques sera déterminante pour relever ces défis et garantir un avenir durable.