Une clientèle majoritairement CSP+
Une enquête menée en 2019 par l’Autorité de régulation des transports (ART) auprès de 7 409 usagers révèle que les cadres et professions intellectuelles supérieures représentaient près de la moitié des voyageurs en TGV, alors qu’ils ne constituent que 10 % de la population française. À l’inverse, les ouvriers et employés, qui forment 45 % de la population, ne comptaient que pour 19 % des passagers.
Depuis cette étude, le prix moyen des billets a augmenté de 8 %, une hausse modérée comparée à celle du transport aérien (+55 %) ou du carburant (+25 à 30 %), selon Alain Krakovitch, directeur de TGV-Intercités. La SNCF rappelle régulièrement que les services de grande vitesse ne reçoivent pas de subventions publiques et doivent générer des bénéfices pour investir dans leurs infrastructures.
L’offre Ouigo : une alternative moins avantageuse qu’auparavant
La SNCF met en avant ses offres low-cost, notamment Ouigo, comme moyen de démocratiser l’accès au TGV. Cependant, le prix des billets Ouigo a considérablement augmenté ces dernières années. En 2023, les tarifs ont grimpé de 10 %, et le coût moyen par passager est passé de 27,60 euros en 2019 à 34,20 euros en 2023, selon la Fédération nationale des associations d’usagers des transports (Fnaut). L’écart entre les offres Ouigo et TGV Inoui tend à se réduire, rendant Ouigo moins compétitif, surtout pour des réservations de dernière minute.
Mobilité et inégalités sociales
Patricia Pérennes, économiste des transports, souligne que la prédominance des CSP+ dans les TGV reflète aussi des différences dans les pratiques de mobilité. Les cadres voyagent davantage, notamment pour des raisons professionnelles, tandis que d’autres catégories, comme les ouvriers ou les employés, effectuent moins de déplacements, souvent limités à leur région d’origine.
Pour autant, Pérennes reste sceptique quant à l’idée de réduire globalement les prix des TGV, affirmant qu’une telle mesure profiterait principalement aux catégories aisées qui voyagent déjà fréquemment. Elle préconise plutôt de réhabiliter des dispositifs tels que le « billet congé annuel », qui offre une réduction de 25 % sur un aller-retour par an, bien qu’il soit actuellement peu utilisé en raison de démarches administratives complexes.
L’arrivée de la concurrence : une lueur d’espoir ?
La concurrence sur certaines lignes, comme la liaison Paris-Lyon exploitée par Trenitalia, pourrait contribuer à une baisse des tarifs, estimée entre 20 % et 30 % par Patricia Pérennes. Toutefois, cette diminution ne concernera que les lignes les plus rentables, représentant environ un tiers du réseau à grande vitesse. Les zones moins attractives, comme Saverne ou Bar-le-Duc, risquent de ne pas bénéficier de ces réductions.
La SNCF, tout en défendant ses choix tarifaires, mise sur la planification et l’anticipation des réservations pour offrir des prix plus accessibles. Néanmoins, l’augmentation régulière des tarifs, même modérée, renforce l’image d’un transport à grande vitesse largement orienté vers les classes sociales les plus favorisées.