Durement affectées par les effets directs et indirects du réchauffement climatique, les forêts françaises, majoritairement privées, sont aussi très morcelées. Un contexte qui nuit parfois à la mise en œuvre des planifications visant à les rendre plus résilientes face aux incendies, aux ravageurs et aux vagues de chaleur.
Plus de chaleur, moins d’eau : pour les forêts, l’équation posée par le réchauffement climatique est implacable. Et elle se conclut presque invariablement par un risque incendie accru. Certes, en France, neuf feux de forêts sur dix sont toujours d’origine humaine, que celle-ci soit volontaire ou non ; mais, avec les sécheresses – y compris hivernales – et les vagues de chaleur à répétition, le réchauffement du climat « a un impact direct sur la fragilité des forêts », d’après l’ONF (Office national des forêts), selon lequel « toute étincelle présente un risque plus grand que si nous étions dans un contexte normal ». Les attaques de parasites (insectes et champignons), elles-mêmes favorisées par les hivers plus cléments, parachèvent de fragiliser des forêts françaises plus que jamais vulnérables : les quelque 72 000 hectares brûlés au cours du seul été 2022 en témoignent.
Un morcellement qui complexifie la prévention des risques incendie
Comment empêcher que ne s’embrasent ces forêts, à la fois plus sèches et plus fragiles, que Météo France n’hésite pas à qualifier de véritable « stock de combustible » prêt à partir en fumée ? Face à un risque incendie désormais généralisé à l’ensemble du territoire métropolitain, les divers acteurs concernés – État, collectivités locales, filière bois-forêt, propriétaires de parcelles, etc. – semblent être tombés d’accord pour « faire de la planification territoriale, en particulier le schéma de cohérence territoriale (Scot), un élément clé de la stratégie », d’après un rapport remis en juin à Emmanuel Macron.
Dans l’Hexagone en effet, 3,3 millions de propriétaires se partagent les trois quarts des 17 millions d’hectares de forêts qui recouvrent aujourd’hui plus de 30 % du territoire national. Un morcellement forestier de la forêt privée qui peut parfois compliquer une stratégie d’ensemble, notamment en matière de lutte contre les incendies.
La filière se mobilise pour une gestion concertée
Le message est clair, mais comment le faire passer aux acteurs concernés ? C’est ici que doit intervenir un travail de sensibilisation portant sur l’importance de gérer en bonne concertation les forêts françaises. Un effort mené depuis plusieurs années par la filière et, plus particulièrement, par le CNPF dont c’est une des missions principales. Entre 2022 et 2023, également, les coopératives forestières ont sensibilisé les professionnels, mais aussi les journalistes et le grand public, à l’intérêt de gérer, de manière plus concertée, les forêts menacées par les conséquences, directes (dépérissement des arbres) ou indirectes (incendies), du réchauffement climatique. C’est dans ce contexte inflammable que l’Union de coopération forestière française (UCFF) milite, en faveur de la gestion forestière regroupée auprès de ses adhérents.
Soutenu par France Bois Forêt, le programme Egefor ambitionne ainsi de « permettre de sensibiliser différents publics à la nécessité de gérer et d’adapter les forêts au changement climatique », explique Nicolas Jobin, responsable communication de l’UCFF.
Dans le même esprit, Antoine d’Amécourt, Président de Fransylva, souligne que : « Notre territoire est caractérisé non pas par une mais par des forêts françaises et par une pluralité de propriétaires. […] Cela rend légitimes et utiles les nombreuses possibilités et configurations de regroupement qui existent en forêt privée : la coopération, bien entendu, mais aussi les divers associations et groupements, tout comme les documents de gestion concertée pour une action coordonnée »
Un combat contre le morcellement qui n’est pas une nouveauté pour la filière : en 2019 déjà, France Bois Forêt avait lancé un programme intitulé « Lutte contre le morcellement de la propriété forestière par l’action foncière des collectivités », qui visait à accompagner les communes dans des projets structurants d’acquisition de parcelles de forêts. Ou comment, à l’échelle de la filière bois-forêt française, mettre en pratique la fameuse maxime selon laquelle « seul, on va plus vite, ensemble, on va plus loin ».