La futaie régulière de chêne figure depuis le 8 juin 2022 à l’inventaire du patrimoine culturel immatériel français. Une « belle reconnaissance » estiment les forestiers.
La futaie régulière de chêne est un mode particulier de sylviculture qui concerne 77 % des peuplements forestiers nationaux. Elle consiste à faire pousser, sur une même parcelle, des chênes d’âge et de dimensions à peu près identiques, sur 100 à 200 ans.
L’inscription de cette méthode au patrimoine culturel immatériel français – dont l’objectif est de répertorier les « pratiques vivantes » – est une « belle reconnaissance pour la communauté des forestiers, qui voient pour la première fois leurs savoirs et savoir-faire identifiés pour leur valeur patrimoniale, se félicite Olivier Rousset, le directeur général de l’Office National des Forêts (ONF) par intérim. Il nous appartient maintenant, collectivement, de faire vivre nos pratiques afin d’en assurer la transmission aux générations futures ». Car grâce à ces futaies, rappelle-t-il, c’est toute une « mosaïque de paysages et de milieux favorables à de nombreuses espèces, parfois rares », qui existe.
Un mode de sylviculture cyclique
Les futaies régulières s’inscrivent dans un cycle à la fin duquel interviennent des coupes. Les coupes d’arbres symbolisent le renouvellement des forêts et leur pérennité : « Tout au long de la vie du peuplement forestier, différentes coupes permettent aux plus beaux arbres de se déployer. Le paysage est ainsi modifié [et] une génération d’arbres donne[ra] lieu à une autre de jeunes semis qui formeront, à leur tour, la forêt de demain » explique l’ONF.
Ces coupes progressives sont réalisées de génération en génération par les forestiers, à échéance plus ou moins longue en fonction des essences : de 10 à 15 ans pour des chênes sessiles – dont les feuilles sont attachées à la tige sans pédoncule – ; de 15 à 30 ans pour les hêtres ; de 30 à 50 ans pour les sapins ou les épicéas en montagne. Tous les 8 à 10 ans, des « coupes d’amélioration » sont également pratiquées afin d’accorder plus de lumière aux arbres, qui peuvent alors se développer, grandir et former une nouvelle forêt. Pour ce faire, une vaste communauté de personnes s’active au quotidien : propriétaires de parcelles (l’État, les collectivités, les personnes privées), scientifiques, naturalistes, formateurs et enseignants forestiers, associations, bien sûr, et autres scieurs, mérandiers, charpentiers, tonneliers, etc.
Des zones de préservation de la biodiversité
La technicité de la futaie régulière a permis d’élever des arbres majestueux et réputés pour la qualité de leur bois. Une fois transformé, ce bois se retrouve dans les parquets, les meubles, ou encore les charpentes – comme celle de la cathédrale Notre-Dame, à Paris – et même dans les arômes de certains vins.
L’importance accordée aux futaies régulières ne tient pas exclusivement à la qualité du bois. En effet, ces étendues forestières jouent aussi un rôle important en matière de biodiversité : « La futaie régulière crée une mosaïque de paysages et de milieux favorables aux habitats de nombreuses espèces parfois menacées (…) Dans les stades successifs de la futaie régulière, on retrouve différents types de biodiversité. (…) La biodiversité de la chênaie régulière est considérable, en termes de nombre d’espèces et de rareté » explique la fiche d’inventaire du patrimoine culturel immatériel du Ministère de la Culture.
Afin de célébrer l’importance des futaies régulières de chêne et leur inscription à l’inventaire national du Patrimoine culturel immatériel, une fête aura d’ailleurs lieu à l’automne 2022, en forêt domaniale de Tronçais (Allier), où il n’est pas rare de croiser certains chênes datant du début de la sylviculture moderne. Soit des arbres d’environ 200 ans.