Des différents secteurs de l’agriculture, l’élevage est, de loin, le plus problématique d’un point de vue environnemental et climatique. Au-delà de la souffrance animale, il génère d’importantes émissions de méthane, un puissant gaz à effet de serre, produit par la digestion des ruminants.
La hausse des prix de l’énergie a un impact beaucoup plus grand sur l’élevage que sur la production végétale
Il est également la principale cause de la déforestation (qui représente de 10 à 15 % des émissions de gaz à effet de serre mondiales), en imposant des surfaces agricoles toujours plus importantes pour nourrir les animaux de rente. L’élevage a donc également des impacts sur la biodiversité, et sur la sécurité alimentaire mondiale : à surface agricole égale, des céréales nourrissent 10 fois plus de personnes que de la viande.
Mais un autre paramètre est rentré en jeu avec la crise énergétique : celui de l’énergie nécessaire pour produire des aliments. Le chercheur Marc Benoît de l’INRIA montre, dans une analyse récente, que « pour 1 mégajoule d’énergie consommée, l’élevage produit entre 0,5 et 1 mégajoule sous forme de lait ou de viande, alors que les grandes cultures (céréales, oléoprotéagineux) en produisent plus de six ».
Dit autrement : il faut entre six et dix fois plus d’énergie pour produire la même quantité de nourriture. L’incidence des prix de l’énergie sur les prix agricoles est donc sir à dix fois plus forts pour les produits d’origine animale.
Qui plus est, la volonté de réduire la consommation d’énergie fossile risque de créer de nouvelles pressions sur les terres agricoles, qui pourraient être utilisées pour produire de l’énergie, des agrocarburants notamment.
Vers un cercle vertueux ou vicieux ?
Hors subvention, les prix des produits d’origine animale devraient donc augmenter, entraînant une baisse de leur consommation, ce qui permettrait de libérer des terres pour produire des végétaux destinés à l’alimentation humaine ou à produire de l’énergie, voire à reforester.
Mais ce cercle vertueux pourrait ne pas advenir. « J’ai personnellement des craintes que les activités d’élevage, au moins à court et moyen terme, ne se réduisent guère », indique Marc Benoît. Si, dans le même temps, l’utilisation de surface agricole pour produire de l’énergie augmente, le cercle deviendrait même vicieux.
« Cela conduirait, de fait, à des tensions très importantes sur le prix de l’ensemble des denrées agricoles destinées à l’alimentation humaine, ainsi qu’une accentuation de la déforestation et le maintien d’une agriculture très intensive, avec des intrants ayant des impacts très négatifs sur la biosphère et la santé humaine », indique le chercheur.