C’est le moment de dresser le bilan : La 27e conférence des Nations unies sur le climat (COP27) a fermé ses portes ce dimanche 20 novembre. La fin de deux semaines de débats et de conférences, qui se sont finalement révélées décevantes sur le plan de la lutte contre les énergies fossiles, mais très encourageantes pour la mise en place de dispositifs financiers destinés à gérer les conséquences du réchauffement climatique.
Ils n’ont pas masqué leur déception : malgré un appel réitéré à réduire « rapidement, profondément et durablement des émissions de gaz à effet de serre », les experts et les diplomates convié à la COP27 n’ont pas réussi à faire plier les pays producteurs d’hydrocarbures pour entériner un plan de réduction et de disparition des combustibles fossiles.
Un échec largement commenté dans la presse internationale, mais qui masque pourtant une belle réussite : la mise sur pied d’un fonds « pertes et dommages » pour aider les pays les plus pauvres à couvrir les coûts des impacts du changement climatique. Et si cette COP27 avait finalement été une réussite ?
Car après tout, cet enjeux financier était au cœur de l’agenda de ce rendez-vous, et dans toutes les têtes des représentants des pays en développement. Car en dépit de l’urgence climatique et de la multiplication des crises environnementales, la communauté internationale apparaissait plus divisée que jamais sur la manière de pallier les conséquences, désormais inévitables, du réchauffement de l’atmosphère terrestre. Il s’agit ni plus ni moins d’une « question de vie ou de mort », avait même tenté d’alerter le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, « pour notre sécurité aujourd’hui et pour notre survie demain ».
Cop27 : la délicate question des « pertes et dommages »
Si la nécessité de lutter contre le changement climatique ne fait plus débat, les discussions ont donc largement achoppé sur l’ampleur des efforts à consentir et, surtout, sur la question du financement de la transition des pays en développement. Alors que les vingt pays les plus riches du monde sont responsables de 80% des émissions de gaz à effet de serre, les pays du Sud ont reproché à ceux du Nord de ne pas tenir leurs engagements : il manquerait ainsi 20 milliards de dollars à l’enveloppe de 100 milliards promise par les pays développés au nom de la « justice climatique ». Mais alors que l’objectif, initialement visé pour 2020, ne devrait pas être atteint avant, au mieux, l’année prochaine, les pays du Sud ont mis la pression sur l’Égypte et les pays du Nord pour que la question des « pertes et dommages » figure en tête de l’agenda de la COP27. Non sans susciter, dans les allées de Charm el-Cheikh, un certain regain de tensions.
Car la question des « pertes et dommages » était essentielle. Consacré dans l’accord de Paris en 2015, le terme renvoie aux dégâts irréversibles engendrés par le dérèglement climatique, que ceux-ci soient immédiats – comme une tempête – ou à plus long terme – comme la montée du niveau de la mer. Or, les mécanismes financiers existants se concentrent, principalement, sur l’atténuation du changement climatique et, dans une moindre mesure, sur l’adaptation des pays à celui-ci. Insuffisant, pour les pays les plus pauvres et les plus exposés, qui ont réclamé avec insistance la création d’un nouveau mécanisme prenant en compte les dégâts d’ores et déjà causés par le réchauffement du climat.
Un rapport de force qui a duré deux semaines, face à des États-Unis et des pays européens qui craignaient d’ouvrir la porte à la possibilité d’être tenus légalement responsables de leur contribution historique à la catastrophe climatique.
Et pour cause : le montant de ces « pertes et dommages » pourrait atteindre, dans les seuls pays en développement, 580 milliards de dollars par an d’ici à 2030, et jusqu’à 1 700 milliards annuels à l’horizon 2050. C’est donc sans surprise qu’Antonio Guterres avait estimé qu’un « accord sur les pertes et dommages sera le principal test décisif pour la COP » de Charm el-Cheikh, le secrétaire général de l’ONU évoquant même « l’impératif moral » que constitue, selon lui, le fait pour les participants à la conférence de parvenir à s’entendre sur ce sujet.
Et si un accord a finalement été conclu in extermis, les tensions croissantes à propos des conséquences financières du changement climatique témoignent d’une prise de conscience accélérée des décideurs publics. Une prise de conscience des risques économiques du risque climatique qui n’est pas l’apanage, loin de là, des seuls chefs d’État et de gouvernement : aux quatre coins du monde, le secteur privé est, lui aussi, entré en mode « damage control » en particulier dans le secteur des assurances.
Le secteur de l’assurance en première ligne : les cas Covéa, AIG et Berkshire
Ainsi du secteur de l’assurance, sans doute l’un des plus directement exposés aux conséquences du dérèglement climatique puisque c’est vers lui que se tournent, très logiquement, les victimes des catastrophes naturelles. Contraint de s’adapter pour survivre, le marché de l’assurance est donc en pleine recomposition. « Plus gros, plus fort », telle semble être la devise qui préside en effet aux divers mouvements de consolidation observés chez les géants du secteur qui, souvent, choisissent de s’adosser à un réassureur : AIG-Validus, Berkshire-Alleghany et, plus récemment, Covéa (MAAF, GMF, MAIF)-Partner Re, un réassureur des Bermudes.
Une stratégie qui fait sens, la mission première des acteurs de la réassurance étant, comme leur nom l’indique, de subvenir aux besoins de liquidités des assureurs quand ces derniers sont confrontés, comme cela va de plus en plus être le cas, à l’obligation d’indemniser les victimes de catastrophes particulièrement dévastatrices.
Rimant longtemps avec émissions de CO2, transition énergétique ou adaptation de nos sociétés, le réchauffement climatique va, selon toute probabilité, de plus en plus s’imposer comme une question de – très – gros sous.