Face à la hausse des prix de l’énergie, les Français plébiscitent le bois pour se chauffer. Quels sont les avantages environnementaux relatifs à l’usage du bois pour produire de la chaleur ?
La moitié de l’énergie consommée en France est utilisée pour produire de la chaleur. Elle est aujourd’hui majoritairement produite par des énergies carbonées et importées (gaz, fioul). Produire cette chaleur à partir d’énergie renouvelable, que ce soit chez les particuliers, les industriels ou pour alimenter des réseaux de chaleur urbains, permet de relocaliser la production d’énergie en valorisant des ressources locales.
Le chauffage au bois domestique représente près de 70% du bois énergie, première source d’énergie renouvelable en France, et apparaît donc comme un enjeu stratégique de la transition énergétique.
Le bois domestique est une énergie économiquement compétitive pour les particuliers, notamment ceux vivant en zone rurale et périurbaine. Par exemple, le remplacement d’une chaudière fioul par une chaudière à granulés permet de faire 1 300€ d’économie annuelle de facture sur le combustible. Il existe des aides au financement de l’achat d’équipements de chauffage utilisant des énergies renouvelables, tels que ma Prime Renov’. Cette aide s’adresse aux propriétaires occupants, propriétaires bailleurs et syndicats de copropriété. Le dispositif se cumule avec d’autres aides comme les Certificats d’économie d’énergie (coup de pouce chauffage), les aides des collectivités territoriales, celles d’action logement et le taux de TVA réduit.
Enfin, le bois énergie contribue au développement ou au maintien d’emplois territoriaux, notamment en zone rurale. A titre d’exemple en 2015, la filière du bois domestique représentait 15 560 emplois directs (ETP), ce qui correspond à plus de 19 % des emplois dans les énergies renouvelables.
Des critiques portent sur les effets du bois-énergie sur la qualité de l’air, qu’en est-il ?
Une attention particulière doit être portée à la qualité de l’air. La combustion du bois émet des particules, mais leur taux va dépendre du type d’appareil et de son ancienneté. Des progrès technologiques ont été réalisés : cela a permis de réduire de manière très significative les émissions. En effet, des études montrent que les appareils récents peuvent émettre jusqu’à 10 fois moins de particules fines que des équipements plus anciens (antérieurs à 2002). Le renouvellement du parc peut donc permettre de réduire fortement les quantités de polluants émis. Cette action de renouvellement des appareils à bois est à inscrire dans une politique globale de rénovation énergétique des logements, et de baisse de consommation, qui réduisent d’autant plus les émissions atmosphériques. A noter que ces fortes réductions sont atteintes si elles s’accompagnent de la mise en œuvre de bonnes pratiques (qualité du combustible, gestion du feu, entretien) et d’un dimensionnement de l’appareil adapté au besoin. Ces actions nécessitent la diffusion d’informations et la sensibilisation du grand public.
Le plan d’action « chauffage au bois domestique performant » annoncé cet été par l’État permettra de répondre à une partie de cet objectif en accélérant le renouvellement des appareils non performants et des foyers ouverts au profit d’équipements performants, en développant l’utilisation de combustibles de qualité et en rappelant les bonnes pratiques d’installation, d’utilisation et d’entretien des appareils.
Pour aider le consommateur à reconnaitre les appareils performants, le label Flamme Verte a été créé en 2000 par les fabricants d’appareils domestiques avec le concours de l’ADEME. Il promeut les appareils de chauffage individuel au bois performants, dont la conception répond à un référentiel de qualité exigeant en termes de rendement énergétique et d’émissions polluantes. A ce jour, le label est géré par le Syndicat des Énergies Renouvelables.
L’ADEME soutient également le réseau FAIRE, qui permet à tous les ménages de disposer de conseils neutres, indépendants et gratuits pour leurs travaux de rénovation.
Le consommateur doit également être bien conseillé lorsqu’il va installer son appareil et s’appuyer sur des entreprises labellisées RGE. En effet, le bon dimensionnement de l’installation par rapport au logement ainsi qu’une mise en œuvre dans le respect des règles de l’art sont essentiels au bon fonctionnement des appareils. Les principaux facteurs influençant les émissions sont l’humidité du combustible et la gestion des entrées d’air.
Ainsi, il est préconisé d’acheter du bois présentant un taux d’humidité inférieur à 20% ou de faire sécher son bois en extérieur sous abri surélevé pendant plus de 18 mois. Il est également recommandé de rentrer son bois près du foyer 24h à 48h avant qu’il soit consommé afin qu’il soit à température de la pièce.
Il doit également avoir une gestion active des entrées d’air et pratiquer à l’allumage par le haut. L’entretien régulier du conduit et de l’appareil par un professionnel est aussi important, avec un ramonage 1 à 2 fois par an selon les cas.
Le bois est aussi reconnu comme un matériau clé pour décarboner les constructions du futur. Pour quelles raisons ?
La gestion forestière durable fournit des matériaux et des énergies renouvelables. Les produits bois peuvent être utilisés à la place des matériaux ou des combustibles fossiles, plus émetteurs de gaz à effet de serre. Un produit bois stocke du carbone pendant toute sa durée de vie. Plus elle est longue, plus le carbone retourne tard dans l’atmosphère. La durée de demi-vie est variable selon les produits et plus élevée pour le bois d’œuvre (50 à 30 ans) et les panneaux particules (25 ans) que pour le papier carton (7 ans).
La lutte contre le changement climatique et l’épuisement des ressources fossiles placent les produits bois au cœur de la transition écologique et énergétique. Pour garantir son caractère renouvelable, la récolte du bois doit s’inscrire dans un cadre de gestion durable des forêts assurant le renouvellement des peuplements et la préservation des services rendus par les forêts.
Quels sont les avantages relatifs à l’utilisation d’un bois produit en France par rapport à l’importation de bois en provenance de pays étrangers ?
Pour le chauffage au bois domestique, les bûches sont les combustibles les plus utilisés (90%), loin devant les granulés (9%), et les autres combustibles (1%) que sont les briquettes reconstituées et les plaquettes. Il s’agit essentiellement d’une ressource locale provenant à 64% de la forêt. On limite donc les émissions liées à la phase de transport. Le bois est essentiellement du feuillu dur (chêne, châtaignier, charme, hêtre, orme…). Parmi les autres sources de bois, 23% des volumes provient de l’entretien des vergers ou de haies, et 13% de récupération.
La question du devenir des matériaux en fin de vie est un sujet de préoccupation majeur. Dans quelle mesure le bois s’inscrit-il dans une économie circulaire ?
L’ADEME a toujours cherché à positionner le bois énergie en complémentarité aux autres usages et donc dans une logique d’économie circulaire. Plus les filières bois d’œuvre se développeront, plus nous aurons du bois disponible pour l’énergie et meilleur sera le bilan environnemental. Ainsi, le principe à respecter est la priorisation de l’usage du bois dans des matériaux à long durée de vie (charpente et couverture, menuiserie et revêtement de sol, ameublement, etc.). Ces matériaux stockent pendant leur durée de vie une partie du carbone prélevé en forêt et peuvent se substituer à d’autres plus émetteurs de GES (acier, béton, plastique, etc.). Il y a donc une nécessité de soutenir le développement de l’utilisation du bois d’œuvre et du bois d’industrie scié en France. Nous avons aussi besoin d’innovations, pour optimiser les usages du bois, en améliorant notamment la valorisation des feuillus, très présents dans la forêt française, et en trouvant de nouveaux débouchés dans la construction en développant les produits bio-sourcés.
Le recours accru au bois-énergie et au bois de construction met-il en danger la pérennité des forêts françaises ?
En France, plusieurs documents stratégiques ciblent des objectifs ambitieux de mobilisation durable des ressources en bois, qui viendront en partie de la forêt (Stratégie nationale Bas Carbone, programme national de la forêt et du bois, stratégie nationale de mobilisation de la biomasse, RE2020, PPE…). Le développement ambitieux du bois construction et du bois énergie implique de mobiliser fortement toutes les ressources biomasse, et notamment celles issue de la forêt. Ces objectifs ont été fixés en s’assurant que le taux de prélèvement pour l’ensemble des usages reste en deçà de l’accroissement des forêts.
En effet, la superficie forestière métropolitaine progresse de 0,7 % par an depuis 1980. Aujourd’hui, la forêt couvre 16,9 millions d’hectares, soit 31 % du territoire. Selon l’inventaire forestier de l’IGN, le volume de bois prélevé chaque année représente en moyenne 60 % de l’accroissement net des forêts de l’hexagone sur la période 2009-2017. Par ailleurs, une étude prospective réalisée par l’IGN, le FCBA et l’ADEME montre un potentiel de récolte additionnelle important en forêt, tout en maintenant des pratiques de gestion durable.
Néanmoins, les pratiques de récolte et le prélèvement de certains compartiments de bois doivent être raisonnés pour assurer la rentabilité de la filière tout en préservant la fertilité des sols, la biodiversité et, in fine, le fonctionnement des écosystèmes. Une forêt plus résiliente et plus résistante a aussi besoin de sols vivants, dotés de bonnes caractéristiques physico-chimiques. Tout cela induit une transformation de nos modes d’exploitation, qui passe par un important travail pédagogique. L’ADEME a fait paraître en 2020 un guide, « Récolte durable de bois pour la production de plaquettes forestières », se référant aux derniers programmes de recherche et aux bonnes pratiques recueillies auprès des professionnels, dont certaines ne demandent qu’à être généralisées.