Une étude parue récemment dans Nature vient remettre en cause la théorie de la forêt comme « puits de carbone ». Au lieu de compter sur ses espaces boisés pour freiner le réchauffement climatique, l’Union Européenne devrait plutôt songer à les protéger.
Les auteurs de cette étude ont étudié les principales stratégies de gestion forestière que les pays européens pourraient mettre en place pour atteindre leurs objectifs climatiques. Une de ces stratégies consiste à favoriser au maximum le stockage du CO2 par les arbres composant les forêts du Vieux Continent.
« Les quantités de carbone séquestrées pendant 90 ans par les arbres (2 parties par million) seraient faibles comparées à la quantité de carbone relarguée dans l’atmosphère pour le scénario le plus probable où le réchauffement continuerait sur sa lancée actuelle (soit environ 500 parties par million) », estime Guillaume Marie, climatologue à l’Université de Paris-Saclay.
Selon les estimations de ces scientifiques, pour absorber 8 milliards de tonnes de dioxyde de carbone d’ici l’horizon 2100, il faudrait remplacer les feuillus de nos forêts européennes par des conifères (espèces qui pompent le plus de CO2) sur une surface équivalente à l’Espagne.
Même dans cette configuration, le résultat ne serait pas garanti : la couleur foncée des conifères alimenterait probablement le réchauffement climatique. « L’erreur classique est de penser que séquestration de CO2 = refroidissement du climat. C’est le cas si on ne change pas les propriétés optique, chimique et physique de la planète. Or en favorisant les forêts de conifères au détriment des feuillus, on change la couleur des feuilles », explique à ce titre M. Marie.
Dans le cadre de l’accord de Paris, l’Union Européenne s’est engagée à diminuer de 40% ses émissions polluantes d’ici l’horizon 2030 par rapport à 1990 en comptant sur ses forêts pour remplir un quart de cet objectif. Pourtant, l’Europe voit son patrimoine forestier se dégrader à vue d’œil (tempêtes, insectes ravageurs, sécheresse et, surtout, activités humaines).
C’est la raison pour laquelle l’étude recommande aux États membres « d’adapter les forêts au climat de demain afin qu’elles puissent rendre encore leurs services écologiques, économiques ou culturels ».