En mai 2016, la Norvège annonce l’attribution de plusieurs concessions pétrolières dans l’Arctique à des groupes pétroliers, parmi lesquels le groupe norvégien Statoil mais également des entreprises américaines (Chevron et ConocoPhillips) et russe (Lukoil). Une décision qui provoque un véritable tôlée dans le milieu des écologistes, qui craignent que les opérations pétrolières fragilisent encore plus l’Arctique et contribuent à accentuer les émissions mondiales de gaz à effet de serre.
Les ONG de protection de l’environnement Greenpeace, Nature et Jeunesse ainsi que Campagne des Grands-Parents pour le Climat décident de passer à l’action : ils assignent en justice le gouvernement norvégien en l’accusant de violer une nouvelle disposition constitutionnelle (le paragraphe 112) qui garantit le droit à un environnement sain à tous les citoyen-ne-s.
Les trois organisations estiment en effet que les activités pétrolières qui vont découler de l’octroi des concessions en mer de Barents, vont à l’encontre de l’Accord de Paris pour le climat et des engagements pris par Oslo en 2016 dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique.
L’issue du procès n’a pas donné raison aux trois ONG. Le tribunal saisi pour l’affaire a en effet estimé que les dispositions du paragraphe 112 de la Constitution ne pouvaient s’appliquer à l’attribution de licences pétrolières. Le juge a notamment expliqué que le gouvernement norvégien ne pouvait être tenu responsable des émissions polluantes induites par ses exportations de produits pétroliers dans les pays partenaires.
« Nous sommes satisfaits que le tribunal ait donné un contenu clair au paragraphe sur l’environnement (…) qui peut être utilisé pour stopper des décisions politiques néfastes. En même temps, nous sommes très déçus qu’il ait créé un vide juridique en prétendant que les émissions dues au pétrole norvégien à l’étranger ne sont pas couvertes par cette disposition de la Constitution », a expliqué aux journalistes de l’AFP Truls Gulowsen, directeur de Greenpeace Norvège.
Il faut dire que ce procès opposait David contre Goliath. La Norvège doit en effet sa richesse et son dynamisme économique au pétrole, qui lui a notamment permis d’amasser un fond souverain estimé à plus de 1.000 milliards de dollars (le plus important du monde). Le gouvernement norvégien compte notamment sur le Grand Nord pour compenser le déclin de sa production pétrolière traditionnelle : la mer de Barents pourrait en effet abriter plus de 65% des ressources pétrolières encore à découvrir au large de la Norvège.
« La politique pétrolière de la Norvège est l’affaire du Parlement, pas du système judiciaire. Et c’est un Parlement unanime moins une voix qui avait adopté le 23ème cycle de concessions pétrolières. Il bénéficie donc d’une solide majorité politique et démocratique », a déclaré Tommy Hansen, porte-parole de l’organisation représentant le secteur pétrolier.
L’avenir du secteur pétrolier norvégien n’est cependant pas certain. Les dernières campagnes de prospection menées dans le Grand Nord n’ont pas particulièrement enthousiasmé les grands groupes pétroliers. Les coûts d’exploitation des éventuelles découvertes se sont en effet annoncés particulièrement élevés, ce qui a découragé plusieurs majors de se lancer dans la région.