Déconfinement : réussir la transition des modes de transport

Déconfinement : réussir la transition des modes de transport

Le déconfinement fait craindre le retour massif à la voiture thermique individuelle. Jugée plus sûre que les transports en commun, elle est pourtant génératrice de pollution atmosphérique. Le développement des mobilités douce couplé à la baisse des prix des véhicules électriques laissent quant à eux présager le décollage d’une mobilité plus durable.

Déconfinés, les Français peuvent enfin se déplacer – presque – à leur guise. Une véritable bouffée d’oxygène pour les citadins, qui représentent 80% de la population de l’Hexagone – mais qui ne signifie pas nécessairement une ruée sur les transports en commun. Crise sanitaire oblige, l’attrait pour ces derniers est, en effet, en chute libre, en dépit de l’obligation de porter un masque et du respect des fameux « gestes barrières ». 

Promiscuité forcée avec des centaines d’inconnus, attente prolongée aux arrêts et stations, brassage de population, etc. : emprunter les transports en commun revient, en somme, à placer sa confiance – et sa santé – dans le civisme des autres. Dans ces conditions, la voiture individuelle fait son grand retour chez les Français. 

La voiture, sixième geste barrière

Ces derniers voient dans la voiture un véritable et inattendu « sixième geste barrière » pour se protéger du coronavirus. Ainsi, ils sont près de neuf sur dix (87%) à affirmer privilégier l’automobile pour leurs premiers trajets post-confinement à longue distance, soit un bond de +22 points par rapport à la situation pré-crise sanitaire. Pourtant, la voiture individuelle thermique ne pourrait représenter une solution satisfaisante, rappelle Anne Hidalgo, la Maire de Paris. Qui souligne les risques sanitaires et environnementaux liés aux véhicules thermiques, notamment en Ile-de-France : « La voiture peut apparaître comme une bulle dans laquelle on est protégé. Le problème est que la voiture pollue, elle émet des particules. Nous savons qu’il y a un lien assez fort entre la pollution, notamment aux particules, et la propagation du coronavirus. Il y a eu beaucoup d’études scientifiques qui ont été faites sur ce sujet-là. Nous savons aussi que la pollution atmosphérique liée pour l’essentiel dans notre agglomération au trafic automobile génère une mortalité et beaucoup de maladies. La voiture n’est pas non plus une solution. ». 

Dans ce contexte, de nombreuses villes ont saisi l’opportunité du déconfinement pour impulser plus largement le développement de mobilités douces. Marche, vélos, trottinettes électriques, la page du véhicule thermique individuel semble bel et bien sur le point d’être tournée. Le forfait mobilité durable est ainsi entré en vigueur dès les premiers jours du déconfinement. Il permet aux entreprises privées qui le souhaitent de prendre en charge les frais de déplacement de leurs collaborateurs sur leur trajet domicile-travail, quand ils sont effectués avec des modes alternatifs comme le vélo, le covoiturage, les engins de déplacement personnels en location ou en libre-service (comme les scooter et trottinettes électriques « en free-floating ») ; l’autopartage avec des véhicules électriques, hybrides rechargeables ou hydrogène ; et avec des titres de transports en commun (hors abonnement).

Le boom des véhicules verts

L’émergence d’une mobilité plus durable devrait également annoncer l’heure de gloire du véhicule électrique. Pour le Gouvernement, qui vient d’annoncer son plan de soutien à l’automobile, la priorité doit être donnée aux véhicules verts, émettant le moins de CO2, au premier rang desquels les véhicules électriques. De quoi signer la fin de certaines idées reçues, selon lesquelles ces voitures pollueraient autant que celles fonctionnant à l’essence. Rien n’est plus faux, si l’on en croit les conclusions de la très sérieuse Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), selon lesquelles une voiture électrique pollue, en moyenne et en considérant l’ensemble de son cycle de vie, 54% moins qu’une essence et 50% qu’une diesel. Et, si l’on roule en France, où l’énergie est très fortement décarbonée grâce au nucléaire et aux renouvelables (pesant à eux deux pour 88% de notre mix énergétique), l’électrique se monte même 74% moins polluant que l’essence et 72% fois de moins que le diesel.

En Europe, le nombre de véhicules électriques devrait être multiplié par trente d’ici à la prochaine décennie. Si les ventes globales de véhicules ont bien accusé le coup au cours des premiers mois de l’année, celles du marché des voitures électriques, hybrides ou rechargeables ont, au contraire, décollé, selon les derniers chiffres du Comité des constructeurs français d’automobiles (CCFA). Les immatriculations de voitures 100% électriques ont ainsi battu un record lors du premier trimestre de l’année, atteignant 7,1% des ventes totales, contre 1,9% l’année précédente. Et les hybrides s’accordent désormais près de 11% du marché, contre moins de la moitié en 2019. 

« Les obstacles liés au prix et à l’autonomie sont en train de tomber »

Ce boom de l’électrique est accompagné par les constructeurs, qui rivalisent d’innovation pour faire sauter les derniers freins psychologiques : l’autonomie des véhicules électriques dépasse ainsi allègrement les 300 kilomètres, s’approchant même des 400 – une limitation qui s’évanouit complètement avec les hybrides rechargeables. Autre frein en passe d’appartenir au passé, le maillage des bornes de recharge continue de progresser, avec près de 30 000 points de recharge accessibles au public dans toute la France – l’objectif étant fixé à 100 000 bornes d’ici à 2021. « Les obstacles liés au prix et à l’autonomie sont en train de tomber », confirme dans les pages du Monde Joseph Beretta, de l’Avere-France : « sur les nouveaux modèles, les tarifs ont baissé et les autonomies dépassent les 300 kilomètres. Désormais, les efforts doivent se porter sur le déploiement des bornes de recharge. Le déficit concerne les installations publiques mais également les copropriétés où il est difficile d’installer des prises ou des Wall-box ». 

Les acteurs de la filière se montrent, précisément, très mobilisés sur la problématique des copropriétés. Ainsi d’EDF, qui se positionne comme un facilitateur résolu de l’électro-mobilité pour tous : particuliers, entreprises, collectivités territoriales – et copropriétés, via sa filiale Izivia, qui a lancé une offre répondant aux besoins spécifiques des habitats collectifs. Enfin, signe palpable de cette accélération en matière de mobilité électrique, en l’Ile-de-France deux annonces font l’actualité : le Grand Paris qui promet plus de 3 000 nouvelles et le Sigeif (Syndicat Intercommunal pour le Gaz et l’électricité en Ile-de-France) qui propose une offre clé-en-main à ses communes adhérentes.